Cuba : un pays pauvre qui est cher
Hasta la victoria siempre
Dès qu’on évoque Cuba, on pense à Fidel, le Che et la révolution permanente. Et c’est vrai ! Au fil des 800 kilomètres que nous avons parcouru sur l’île entre Santiago de Cuba et La Havane, nous avons constaté une multitude de ‘Patria o muerte’ ou ‘Hasta la victoria siempre’. Le pays est figé dans ce passé mythifié. Rien ne doit changer, et pourtant tout a changé. Le pays s’est considérablement appauvri notamment ces dernières années. Cela a d’ailleurs donné places à des émeutes, il y a presque deux ans jour pour jour. Elles ont été durement réprimées par le président actuel de Cuba, Miguel Diaz-Canel. C’est l’époux de la fille de Raul Castro. Le pouvoir est bien gardé ! Le pays est pauvre, nous allons en parler dans cet article, mais en même temps il est cher. Un restaurant, par exemple, coûte autant voire plus qu’en France. Comment est-ce possible ? Pourquoi ce pays pauvre est cher ? Pour répondre à cette question, il est nécessaire de comprendre cette révolution hasta la muerte et les effets pervers que cela induit.
Offre et demande
Classiquement pour bien comprendre le niveau des prix, on se réfère à la loi de l’offre et de la demande. Plus la demande se réduit et plus les prix ont tendance à baisser. Donc à Cuba, face à la déliquescence du pouvoir d’achat de la grande majorité des cubains, les prix devraient baisser. Sauf que, au pays de la Terre fertile (C’est le nom de Cuba en Taino, un des peuples amérindiens d’avant Christophe Colomb) le problème vient de l’offre qui est rare. D’un côté, il y a l’État cubain qui gère une grande partie de l’économie et donc de l’offre de services publics notamment. De l’autre il y a les biens, principalement importés, qui obéissent à une logique spécifique que nous allons expliquer ci-dessous. Mais commençons par le monopole d’État.
Fidel et le Che
Le premier janvier 1959, le dictateur Batista, installé par les États-Unis, s’enfuit et emporte avec lui un gros magot. Fidel, le Che et ceux qui ont fomenté la révolution depuis leur arrivée sur l’île le 2 décembre 1956 (1), prennent le pouvoir. Tous les biens seront alors nationalisés et notamment les nombreux hôtels et casinos financés par la mafia italo-américaine. L’État va alors se mettre au service de l’ensemble de la population. Effectivement dans les premières années, une myriade de lettrés se sont mis au service de la révolution pour alphabétiser une grande partie du peuple non éduqué. Puis l’ensemble de la population eut accès à l’éducation et à la santé gratuites. Mais soixante-dix ans après le système fait défaut.
Des professeurs pauvres
Les professeurs sont tellement peu payés que personne ne souhaite exercer le métier. Les mauvaises langues diront que c’est la même chose en France, mais il faut avoir en tête une certaine réalité des choses. Un professeur peut obtenir maximum 6000 pesos cubains. Dans la rue, le taux officieux est de un euro pour 200 pesos cubains et non pas 26 pesos comme présenté officiellement. Autrement dit un professeur gagne moins de trente euros en moyenne. Alors vous allez me dire que cependant le pouvoir d’achat avec trente euros à Cuba est supérieur à la France ou l’Espagne. Et non ! C’est même le contraire. Autrement dit, un professeur actuel, qui n’aurait aucune autre entrée d’argent ne peut que survivre. Ce n’est pas le maigre rationnement mensuel, Libreta de Abastecimientos, proposé à tous qui va changer la donne. Un demi kilo de sucre, de la farine, trois kilos de riz et quelques denrées supplémentaires ne peuvent plus faire la différence. Donc aujourd’hui, un professeur, comme tous les fonctionnaires, tente d’avoir un autre job en parallèle.
Des immeubles délabrés
Concernant les biens immobiliers, tout a été nationalisé puis chaque famille est devenu propriétaire de l’appartement ou éventuellement de la maison occupée. Ce fut une grande avancée sociale à l’époque. Malheureusement aujourd’hui la crise fait que l’État est incapable de rénover les façades des immeubles qui sont alors dans un état de décrépitude très avancée (2). A chaque saison des pluies entre juillet et novembre des immeubles quasi-détruits tombent sous les rafales. Les seuls bâtiments bien entretenus, sont les hôtels et les ressorts qui reçoivent les touristes, ainsi que les bâtiments officiels et les maisons des oligarques.
Quand le bâtiment va, tout va
En économie, on avait l’habitude de dire « quand le bâtiment va, tout va ». En effet, c’est un secteur qui a beaucoup de retombées indirectes et qui est donc à l’origine de beaucoup de créations d’emplois. Or à Cuba, le système est bloqué. En effet l’État qui n’a plus d’argent, n’investit pas dans ce qui permettrait un certain dynamisme économique. Le gouvernement a assoupli le système ces dernières années, en permettant à des petites entreprises privées de proposer des services. Mais du côté de la demande, le manque de moyens financiers des cubains, limite les retombés positives de l’esprit d’entreprise. Pourquoi ne pas faire un crédit ? L’État permet depuis 2011 l’accès à des crédits particuliers. En creux, cela signifie donc que jusque là, cela n’était pas légal. Or, c’est tout l’intérêt des crédits bancaires ; Permettre à des personnes qui n’en ont pas les moyens d’avoir accès à des biens de consommation qui ont un certain coût. De toute façon les conditions sont trop drastiques pour que le cubain moyen puisse prétendre faire un crédit.
Les Mipymes : une opportunité ?
Pour l’électroménager, le multimédia, les vêtements et autres biens de consommation courante, c’est également très compliqué pour les cubains. Il n’y a pas de production locale. Donc les biens sont importés. Face à la grave crise qui s’est amplifiée depuis la pandémie et la guerre en Ukraine, le gouvernement a permis depuis 2021, la création de petites entreprises, les Mipymes (3). Cela a assoupli les conditions. Les cubains ont plus facilement accès à des biens qu’ils ne pouvaient pas se procurer dans les magasins d’État. Pour autant, de nombreuses restrictions existent. Par exemple, les importations ne peuvent se faire que par l’intermédiaire d’agents de l’État qui vont s’enrichir au passage. Au final, les produits proposés par ces nouvelles entreprises sont plus chers. L’ État, reprenant les diatribes communistes en usage, accuse alors régulièrement ces nouvelles entreprises privées d’alimenter l’inflation.
Une Estrella contre la Cristal
Qu’en est-il de l’alimentaire ? Beaucoup de cubains aujourd’hui ne font que survivre. Ainsi, les retraités qui sont les gros perdants du système inflationniste reçoivent une retraite très dévalorisée par rapport aux prix qui ne cessent de monter. La population à Cuba est de plus de 11 millions de personnes dont 1,6 millions de retraités. Plus de la moitié de ces derniers perçoivent la retraite minimale qui s’élève à 1500 pesos (4). Or pour te donner un exemple, le litre de lait coûte 3 euros ce qui fait 600 pesos. Hallucinant, non ! Résultat, le lait, les yaourts et autres produits laitiers, ne font plus partie de l’alimentation de nombreux cubains. Pour des raisons de santé, l’État continue à distribuer du lait pour chaque enfant de moins de 7 ans, dans les rations mensuelles données aux familles. De nombreux produits alimentaires sont importés. Dans un restaurant, j’ai demandé une Cristal, la bière locale, et on m’a répondu qu’il n’y en avait pas. Par contre à la place on m’a proposé une Estrella, importée d’Espagne.
Dollars et euros contre pesos
Or les produits importés sont payés en dollars ou euros. Les cubains tentent de se procurer ces devises étrangères et ainsi le taux de change du peso cubain ne cesse de se détériorer, ce qui alimente en retour encore une fois l’inflation. A ce stade, je me dois de faire une petite remarque notamment pour ceux qui ont voyagé à Cuba, il y a déjà quelques années. A cette époque il y avait deux monnaies à Cuba, le peso national et le peso convertible utilisé par les touristes dans des magasins où les cubains n’avaient pas accès. Ce véritable apartheid social au détriment des cubains a été remis en cause depuis 2021. Aujourd’hui il n’existe qu’une seule monnaie nationale à Cuba, le peso ou CUP. Mais finalement la résilience du système est patent. En effet, le système monétaire reste dual avec d’un côté un peso cubain pour l’usage courant et de l’autre les euros ou dollars que veulent se procurer les cubains. Ainsi, dans certains restaurants, on nous a refusé le peso cubain durant notre périple entre Santiago de Cuba et La Havane.
Conclusion
A l’issue de cet article, tu as compris que l’économie cubaine va mal. Le système étatique ne permet plus de pallier aux difficultés quotidiennes. Malgré les assouplissements et la possibilité de créer depuis 2021 une entreprise privée, l’offre ne suit pas et donc les prix augmentent. La monnaie locale continue à perdre de sa valeur face à la méfiance des cubains et l’attrait des monnaies étrangères. Le cocktail est explosif ! Allons nous servir un Cuba Libre.
El mismo articulo en español
Hasta la victoria siempre
Cuando uno piensa en Cuba, piensa en Fidel, en el Che y en la revolución permanente. Y es cierto. Mientras recorríamos los 800 kilómetros de la isla entre Santiago de Cuba y La Habana, nos encontramos con multitud de carteles de « Patria o muerte » y « Hasta la victoria siempre ». El país está atrapado en ese pasado mítico. Nada debería cambiar, pero todo ha cambiado. El país se ha empobrecido considerablemente, sobre todo en los últimos años. Esto provocó disturbios hace casi exactamente dos años. Fueron duramente reprimidos por el actual presidente de Cuba. Miguel Díaz-Canel. Es el marido de la hija de Raúl Castro. El poder está bien guardado. El país es pobre, como hablaremos en este artículo, pero al mismo tiempo es caro. Un restaurante, por ejemplo, cuesta tanto o más que en Francia. ¿Cómo es posible? ¿Por qué es caro este país pobre? Para responder a esta pregunta, tenemos que entender la revolución hasta la muerte y sus efectos perversos.
Oferta y demanda
La forma clásica de entender los niveles de precios es remitirse a la ley de la oferta y la demanda. Cuanto más se reduce la demanda, más tienden a bajar los precios. Así que en Cuba, dada la disminución del poder adquisitivo de la inmensa mayoría de los cubanos, los precios deberían estar bajando. Salvo que, en el país de la tierra fértil (que es el nombre de Cuba en taíno, uno de los pueblos amerindios precolombinos), el problema es la oferta, que es escasa. Por un lado, está el Estado cubano, que gestiona gran parte de la economía y, por tanto, de los servicios públicos que se ofrecen. Por otro, están las mercancías, principalmente importadas, que obedecen a una lógica específica que explicaremos a continuación. Pero empecemos por el monopolio estatal.
Fidel y el Che
El 1 de enero de 1959, el dictador Batista, instalado por Estados Unidos, huyó llevándose una gran suma de dinero. Fidel, el Che y los que habían estado fomentando la revolución desde su llegada a la isla el 2 de diciembre de 1956 (1), tomaron el poder. Todos sus bienes fueron nacionalizados, incluidos los numerosos hoteles y casinos financiados por la mafia italoamericana. El Estado se puso entonces al servicio del conjunto de la población. De hecho, en los primeros años, una miríada de personas alfabetizadas se puso al servicio de la revolución para alfabetizar a una gran parte de la población inculta. Entonces toda la población tenía acceso a la educación y la sanidad gratuita.
Profesores pobres
Entonces toda la población tenía acceso a la educación y la sanidad gratuitas. Pero setenta años después, el sistema falla. Los profesores cobran tan poco que nadie quiere hacer el trabajo. Las lenguas maliciosas dirán que en Francia pasa lo mismo, pero hay que tener en cuenta cierta realidad. Un profesor puede cobrar un máximo de 6.000 pesos cubanos. En la calle, la cotización no oficial es de un euro por 200 pesos cubanos, y no de 26 pesos como se dice oficialmente. En otras palabras, un profesor gana menos de treinta euros de media. Así que me dirás que con treinta euros, el poder adquisitivo en Cuba es mayor que en Francia o España. Pero ¡no! De hecho, ocurre lo contrario. En otras palabras, un profesor actual que no tiene otra fuente de ingresos sólo puede sobrevivir. La exigua ración mensual, Libreta de Abastecimientos, ofrecida a todos no va a cambiar la situación. Medio kilo de azúcar, algo de harina, tres kilos de arroz y algunas cosas más ya no pueden marcar la diferencia. Así que hoy, un profesor, como todos los funcionarios, intenta tener otro trabajo aparte.
Inmuebles desvencijados
En cuanto a los bienes inmuebles, todo se nacionalizó y entonces cada familia se convirtió en propietaria del piso o, posiblemente, de la casa ocupada. Fue un gran avance social en aquella época. Desgraciadamente, hoy en día la crisis hace que el Estado no pueda renovar las fachadas de los edificios, que se encuentran en un estado de deterioro muy avanzado (2). Cada temporada de lluvias, entre julio y noviembre, las ráfagas de viento arrasan los edificios casi destruidos. Los únicos edificios en buen estado son los hoteles coloniales y los complejos turísticos que reciben turistas. En economía, solíamos decir ‘cuando se va el edificio, se va todo’. De hecho, es un sector que tiene muchas derivaciones indirectas y, por tanto, es fuente de mucha creación de empleo. Pero en Cuba, el sistema se ha paralizado. El hecho es que el Estado, que no tiene más dinero, no invierte en lo que permitiría un cierto dinamismo económico. El gobierno ha flexibilizado el sistema en los últimos años, permitiendo que pequeñas empresas privadas ofrezcan servicios. Pero por el lado de la demanda, la falta de medios de los cubanos limita los efectos positivos de la iniciativa empresarial. ¿Por qué no pedir un préstamo? Desde 2011, el Gobierno permite el acceso a préstamos individuales. En pocas palabras, esto significa que hasta ahora no era legal. Pero ese es el sentido del crédito bancario: dar acceso a bienes de consumo que tienen un cierto coste a personas que no pueden permitírselo. En cualquier caso, las condiciones son demasiado estrictas para que el cubano medio pueda acceder al crédito.
Les Mypimes : una oportunidad ?
Para los electrodomésticos, multimedia, ropa y otros bienes de consumo cotidiano, también es muy complicado para los cubanos. No hay producción local. Así que los bienes se importan. Ante la grave crisis que se ha agravado desde la pandemia y la guerra de Ucrania, desde 2021 el gobierno ha permitido la creación de pequeñas empresas, las Mipymes (3). Esto ha aliviado las condiciones. Los cubanos tienen ahora un acceso más fácil a bienes que no podían comprar en las tiendas estatales. Sin embargo, sigue habiendo muchas restricciones. Por ejemplo, las importaciones sólo pueden hacerse a través de agentes estatales, que se enriquecen en el proceso. Como consecuencia, los productos que ofrecen estas nuevas empresas son más caros. El Estado, haciéndose eco de las habituales diatribas comunistas, acusa regularmente a estas nuevas empresas privadas de alimentar la inflación.
Una Estrella contra la Cristal
¿Y la comida? Muchos cubanos hoy apenas sobreviven. Por ejemplo, los pensionistas, que son los grandes perdedores del sistema inflacionista, reciben una pensión muy devaluada en relación con los precios, que siguen subiendo. Cuba tiene una población de más de 11 millones de habitantes, de los cuales 1,6 millones son pensionistas. Más de la mitad de ellos reciben la pensión mínima de 1.500 pesos (4). Por poner un ejemplo, un litro de leche cuesta 3 euros, es decir, 600 pesos. Increíble, ¿verdad? Como consecuencia, la leche, los yogures y otros productos lácteos han dejado de formar parte de la dieta de muchos cubanos. Por razones sanitarias, el gobierno sigue distribuyendo leche a todos los niños menores de 7 años, como parte de las raciones mensuales que se entregan a las familias. Muchos productos alimenticios son importados. En un restaurante, pedí una Cristal, la cerveza local, y me dijeron que no había. En su lugar me ofrecieron una Estrella, importada de España.
Dólars y euros contra pesos
Pero los productos importados se pagan en dólares o euros. Los cubanos tratan de obtener estas divisas, por lo que el tipo de cambio del peso cubano sigue deteriorándose, lo que a su vez alimenta de nuevo la inflación. Llegados a este punto, debo hacer un breve comentario, sobre todo para quienes viajaron a Cuba hace unos años. En aquella época había dos monedas en Cuba, el peso nacional y el peso convertible que utilizaban los turistas en las tiendas a las que no tenían acceso los cubanos. Este verdadero apartheid social en detrimento de los cubanos se ha puesto en tela de juicio desde 2021. Hoy sólo existe una moneda nacional en Cuba, el peso o CUP. Pero al final, la resistencia del sistema es evidente. De hecho, el sistema monetario sigue siendo dual, con el peso cubano de uso cotidiano por un lado y los euros o dólares que los cubanos quieren comprar por otro. En algunos restaurantes, por ejemplo, nos negaron el peso cubano durante nuestro viaje entre Santiago de Cuba y La Habana.
Conclusión
Al final de este artículo, habrás comprendido que la economía cubana va mal. El sistema estatal ya no es capaz de paliar las dificultades cotidianas. A pesar de la flexibilización de las restricciones y de la posibilidad de crear una empresa privada desde 2021, la oferta no sigue el ritmo y los precios suben. La moneda local sigue perdiendo valor ante la desconfianza cubana y la atracción de las divisas extranjeras. ¡El cóctel es explosivo! Vamos a servirnos una Cuba Libre.
Annexe :
(1) https://journals.openedition.org/etudescaribeennes/23103
(2) https://diariodecuba.com/cuba/1592340139_23207.html
(3) https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=pymes+cuba&spell=1&sa=X&ved=2ahUKEwicy6j_taSAAxWidqQEHWgVDDIQBSgAegQICBAB&biw=1366&bih=615&dpr=1#fpstate=ive&vld=cid:858aadfd,vid:NZ3RUyekWQ8
(4) https://www.cubanet.org/destacados/estas-son-las-nuevas-pensiones-en-cuba/
MAJ juillet 2023 Cuba : un pays pauvre qui est cher @ Philippe Herry