Un article ci-dessous à améliorer
L’histoire fourmille de prises de pouvoir non pacifiques. Ce fut en quelque sorte la règle pendant des siècles et des siècles. Ainsi nous retrouvons pèle mêle:
Des assassinats ; au moyen-âge et à la Renaissance, l’accession des Médicis ou des Borgia au pouvoir dans les cités italiennes.
Des insurrections ; Révolution française avec le 14 juillet 1789 ou Révolution russe avec les journées de février 1917 (avec abdication du tsar en mars).
Des guerres civiles ; prise du pouvoir par Franco en Espagne entre 1939 et 1975, après une guerre civile débutant en juillet 1936.
Des complots ; le coup d’état de Pinochet au Chili en septembre 1973, avec la mort du Président S. Allende au cours de l’assaut du palais présidentiel
Nous pouvons dire que la conquête pacifiée et codifiée du pouvoir par les élections correspond à un état exceptionnel et récent, et constitue un des principaux apports des démocraties.
Quels sont les cadres institutionnels qui permettent la meilleure représentation possible des citoyens ? Les représentants au pouvoir sont-ils vraiment à l’image du peuple ?
Notions à maîtriser : – pluralisme politique – modes de scrutin – parité – démocratie délibérative
I. Les différents types de démocratie
A. La démocratie directe
Définition : La démocratie directe est un système politique où le peuple exerce directement son pouvoir, en prenant lui-même les décisions, au lieu de les déléguer à des représentants.
La cité athénienne représente l’archétype de la démocratie directe. Et pourtant, la démocratie athénienne ne concerne qu’une toute petite partie de la population, puisque sont exclus de la possibilité de voter : les femmes, les étrangers, les esclaves …
La démocratie directe aujourd’hui?
Dans un état représentatif, « le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants », déclarait l’Abbé Sieyès, le 7 septembre 1789. En effet, la densité de la population limite au niveau national la démocratie directe. Pour autant, le référendum, répond à la caractéristique de la démocratie directe. On demande aux citoyens de s’exprimer, sans le détour des représentants.
Exemples en France : sur le Traité établissant une Constitution pour l’Europe en 2005, sur le quinquennat en 2000, sur le Traité de Maastricht en 1992, et le dernier en date, le référendum d’autodétermination sur l’indépendant de la Nouvelle-Calédonie, organisé en novembre 2018.
Le saviez-vous?
Le RIC c’est chic! Voila un slogan, qui est apparu avec l’acte V des Gilets Jaunes en décembre 2018. Le Référendum d’Initiative Citoyenne (RIC) ou Populaire (RIP) reprend l’idée d’une démocratie exercée par le peuple. Ainsi on pourrait avoir, si on reprend les idées des Gilets Jaunes, le Référendum Constituant pour modifier la Constitution, le Référendum Abrogatoire si on souhaite supprimer une loi, le Révocatoire pour déposer un responsable politique et enfin le Législatif pour proposer une loi. Cela fait CARL pour ceux qui affectionnent les acronymes! Mais qui est à l’origine de cette idée? On retrouve notamment Etienne Chouard, un blogueur particulièrement influent sur la toile. Ils se définit comme un démocrate radical, anarchiste de l’ultra-gauche. Après avoir pris contact avec Fly Rider, une des figures des Gilets jaunes, le RIC est devenu le leitmotiv de tout le mouvement. C’est une sacré manière de faire de la politique sans parti. En d’autres temps, on aurait qualifié cela d’entrisme! Mais c’est une autre histoire, pas si lointaine, n’est-ce pas M. Jospin? |
Mais c’est surtout au niveau local que nous pouvons retrouver les traces de la démocratie directe. Cela fera d’ailleurs l’objet de la dernière partie du thème, qui interroge sur le renouveau du système politique.
B. La démocratie représentative
La « démocratie représentative »: C’est un système politique où le peuple délègue sa souveraineté à des représentants élus, et au gouvernement qui émane de la majorité de ceux-ci.
Comme nous l’avons vu précédemment, cela parait être une nécessité, lorsque les groupes humains sont nombreux et dispersés sur un territoire, il peut être compliqué de les faire voter fréquemment pour les décisions organisant la vie en société. Dès lors, ils choisissent leurs représentants chargés de gérer la chose publique au nom du peuple.
La démocratie représentative repose sur 4 grands principes:
– « la réitération de l’élection » : chaque transition du pouvoir doit s’effectuer par le moyen d’une élection. Celle-ci ne doit pas intervenir une seule fois, et définir ensuite un régime qui s’affranchirait du risque de l’alternance (comme l’Allemagne nazie avec des élections en 1933 pour un régime qui dura jusqu’en 1945) ;
– « l’indépendance des gouvernants » : une fois élus, les représentants exercent leur mandat en ne rendant des comptes qu’à la fin de celui-ci, lors de la nouvelle élection ;
– « le rôle central dévolu au débat parlementaire » : c’est le débat entre les représentants du peuple qui permet la prise de décision, par formation d’une ou plusieurs majorités si des renversements d’alliance interviennent ;
– « la liberté d’opinion » : base de la démocratie dans toutes les acceptations du terme.
Quels en sont les dérives ?
A la limite, les représentants élus peuvent siéger et appliquer leur programme pendant la durée de leur mandat, sans consulter la population jusqu’aux élections suivantes. Il peut en découler un risque despotique, comme le «despotisme démocratique» dénoncé par A. de Tocqueville (1805-1859).
Transition: dans une démocratie représentative, les partis politiques ont une fonction centrale
II Le pluralisme et les partis politiques
Le pluralisme politique désigne un système politique reconnaissant l’existence de courants d’idées variés, pouvant s’organiser en partis politiques et ayant la possibilité de concourir pour l’accès au pouvoir.
Les caractéristiques des partis:
– L’idéologie. Un parti rassemble des personnes qui ont des valeurs et des idées en commun
– Un parti cherche à jouer un rôle politique, à participer au pouvoir ou à l’opposition ;
– Un parti est durable, il existe indépendamment de ses membres
– Une organisation dont l’implantation va du local au national, voire à l’international (Internationale socialiste par exemple) ;
– Un parti recherche le soutien populaire, c’est-à-dire fait de la communication, des évènements, cherchent à attirer des adhérents et des électeurs ! (sinon on est dans le lobby… )
On peut donc en déduire une définition du parti politique : un parti politique est un ensemble durable et organisé de personnes, qui partagent des valeurs (une idéologie) et qui se regroupent pour défendre leurs idées, permettre leur expression et chercher à occuper le pouvoir politique pour mettre ces idées en application en gouvernant.
La définition de Palombara et Weiner dans Political Parties and Political Development (1966): ‘les partis politiques sont des organisations durables, possédant des ancrages locaux et dont l’objectif est la conquête du pouvoir au moyen de la recherche du soutien populaire.’
III. Les modes de scrutin et les compétitions électorales
Les modes de scrutin sont les techniques utilisées pour attribuer les sièges lors d’une élection. On distingue le scrutin majoritaire, proportionnel et mixte.
A. Les effets des modes de scrutin
Un travail sur différentes formes de scrutin électoral permet de dégager les idées suivantes:
Les scrutins majoritaires conduisent le plus souvent à l’apparition de majorités stables, fondées sur un affrontement avec l’opposition (la coalition qui l’emporte gouverne seule) et au prix d’une injustice dans la représentation.
Le scrutin majoritaire à un tour, permet l’élection des représentants des partis majoritaires
Cela favorise les alternances, mais entre seulement deux partis (au Royaume-Uni par exemple).
Le scrutin majoritaire à deux tours, celui de la Vème République, a la souplesse de l’alternance et incite plus de partis à conclure des alliances de second tour.
Les avantages et désavantages du mode de scrutin majoritaire ?
L’avantage est que le scrutin majoritaire permet de dégager une majorité (sauf exception) et de gouverner.
Les inconvénients sont divers :
– les partis minoritaires sont écrasés par le scrutin majoritaire car ils disparaissent souvent du second tour, donc ont peu d’élus, alors qu’ils ont un réel poids électoral ;
– ce scrutin conduit à la bipolarisation de la vie politique autour de deux grands partis : Démocrates contre Républicains aux États-Unis, Travaillistes contre Conservateurs au Royaume-Unis, SPD contre CDU en Allemagne.
Le scrutins proportionnel fait apparaître une meilleure représentation des électeurs, puisque plus de partis sont représentés.
Quels sont les avantages et inconvénients du scrutin proportionnel ?
L’avantage est que l’ensemble des opinions politiques significatives (en général plus de 5% des exprimés) peut être représenté dans une assemblée politique élue. Il y a alors une représentation politique plus large.
Les inconvénients sont pluriels :
– il peut ne pas avoir de majorité claire, d’où une difficulté pour procéder aux choix collectifs ;
– la recherche d’une majorité peut conduire à des ententes temporaires entre partis politiques, lesquelles ne permettent pas d’assurer une stabilité politique pour l’exécutif, le temps que les politiques publiques mises en œuvre puissent porter leurs fruits ;
– les petits partis, souvent centristes, se voient alors attribuer un rôle charnière comme force d’appoint, et négocient âprement leur ralliement, en obtenant un poids politique disproportionné par rapport à leur poids électoral
Cette synthèse sur les modes de scrutin nous a permis de mettre à jour le dilemme inhérent à toute élection: faire un choix entre stabilité politique et large représentativité des citoyens.
Pour ceux qui soutiennent le mode de scrutin proportionnel, les proportionnalistes, un système électoral doit donner une image fidèle de la situation politique. A contrario, pour ceux qui défendent le mode de scrutin majoritaire, ce dernier vise à donner une majorité d’élus capables de gouverner.
B. Les modes de scrutin en France
Élections |
Mode de scrutin |
Durée du mandat |
Observations |
Présidentielles | Scrutin universel direct, uninominal majoritaire à 2 tours. | 5 ans | Les deux candidats arrivés en tête du 1er tour sont qualifiés pour le 2nd tour |
Législatives | Scrutin universel direct, uninominal (candidat + suppléant), majoritaire à 2 tours, sur les 577 circonscriptions. | 5 ans | Second tour si 1er candidat < 50% voix et si il y a au minimum 25% inscrits. Ausi 2nd tour : candidat > 12,5 % des inscrits, ou 2 1ers. |
Sénatoriales | Scrutin indirect (grands électeurs) uninominal majoritaire à un tour ou de liste et proportionnel. | 6 ans, renouvelé par moitié | Scrutin majoritaire si 1 ou 2 sénateurs ds dépt.
Scrutin de liste si sénateurs ds dépt. > ou = 3 |
Européennes | Scrutin de liste à la proportionnelle à un tour, par circonscription de grande région (5). | 5 ans | Pour avoir des élus, faire > 5% des exprimés |
Régionales | Scrutin de liste, mixte à deux tours, par circonscription départementale. | 5 ans | Pour avoir des élus, faire > 5% des exprimés |
Cantonales | Scrutin universel direct, uninominal (candidat + remplaçant), majoritaire à 2 tours, sur les 59 cantons du dépt de LA. | 6 ans | Second tour si 1er candidat < 50% voix et 25% inscrits. Au 2nd tour : candidat > 12,5 % des inscrits, ou 2 1ers. |
Municipales | Scrutin de liste, mixte à deux tours, par commune. | Pour avoir des élus, faire > 5% des exprimés |
Remarque: en France, on utilise le mode de scrutins indirect pour quelques élections:
– Les sénatoriales. Les sénateurs sont élus par les grands électeurs (environ 150 000 en France). Les grands électeurs sont :les Députés, es conseillers généraux et régionaux, les maires et délégués du conseil municipal, en fonction de la taille de la commune.
– Les élections des délégués dans les conseils des Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), comme les communautés urbaines ou d’agglomération, communauté de communes ou de pays. Ce sont alors les conseillers municipaux qui désignent leurs représentants, dont le nombre varie en fonction de la taille de la commune.
Les élections sont devenus une règle clé dans la plupart des démocraties et pourtant on sent un essoufflement du système. Les taux d’abstentions à certaines élections sont très élevés, et les citoyens ne se sentent pas toujours happés par ce souffle démocratique.
IV. Un fonctionnement électoral à améliorer
A. Des interrogations liées à la représentativité du corps électoral
Analysons le document suivant
Catégories sociales des députés français depuis 1997 (pour 577 députés)
Catégories socioprofessionnelles | Législature 2002-2007 | Législature 2007-2012 | Législature 2012 -2017 |
Agriculteurs |
21 |
17 |
15 |
Cadres du privé et professions libérales |
244 |
228 |
216 |
Enseignants |
76 |
78 |
45 |
Artisans, commerçants, chefs d’entreprise |
53 |
40 |
31 |
Employés |
28 |
22 |
20 |
Ouvriers |
3 |
– |
– |
On constate que
Le nombre de salariés d’exécution (ouvriers et employés), déjà faible (31 en 1997), soit 5,4%, est en baisse (22 en 2012, soit 3,8%). Sachant que la population active française compte environ la moitié de ces catégories socioprofessionnelles, elles sont donc très largement sous représentées
Les classes moyennes, ici les enseignants et les artisans commerçants chefs d’entreprises, sont également moins nombreux : respectivement 45 contre 106, et 31 contre 53
Les cadres du privé se maintiennent à un peu plus de 200, 37,5% des députés en 2012, et se sont même un peu renforcé
La catégorie qui n’apparait pas ici est celle des fonctionnaires de catégorie A et A+, non enseignant, dont la part est croissante car on l’obtient par déduction des autres : de 170 autres en 1997, on est passé à 250 en 2012.
On peut donc en conclure que les catégories populaires sont très largement sous représentées parmi les députés, que cette tendance s’aggrave et qu’elle touche également en partie certaines fractions des classes moyennes, pourtant présentes auparavant.
Et la “minorité visible” ?
Qu’est-ce que « les minorités visibles » ?
Les « minorités visibles » sont constituées des immigrés, même citoyens français, et des français d’outre mer, dont l’apparence physique sort du portrait robot du français moyen, blanc et portant un patronyme d’ascendance française ou non. C’est la couleur de peau, l’apparence physique qui peut constituer un stigmate, traduisant éventuellement l’appartenance à une culture différente.
Les “minorités visibles” sont-elles vraiment représentés? Prenons un exemple. Aux élections législatives de 2012, on a estimé que a part à 35 députés dont ceux des DOM – TOM, soit 6% des députés. Mais la représentation ne correspond pas forcément au ressenti du poids de ces minorités visibles dans la population.
Pour autant la représentation des minorités visibles est plus forte dans les assemblées communales. Tris explications divergentes, mais complémentaires:
– Comme il y a près de 500 000 conseillers municipaux en France, la concurrence est moins rude que pour accéder à des fonctions parlementaires, et le prestige est aussi moins important ! Il est donc plus facile pour des représentants des minorités de s’y faire élire, en s’étant fait remarquer, en particulier au sein de la vie associative ;
– comme l’engagement municipal est le 1er niveau d’engagement politique, de proximité, il faut d’abord en passer par là, faire ses preuves, avant de prendre du galon (adjoint au maire, conseiller régional …) et enfin prétendre à des fonctions parlementaires ; ce processus prend du temps et il ne fait que commencer depuis la 2nde génération (les parents n’ayant pas forcément le droit de voter …)
– les membres des minorités visibles émanent surtout des milieux populaires, et ce sont les catégories qui sont le plus éloignées de la politique, du vote, encore plus du militantisme et de la candidature, donc de l’élection.
Certaines catégories de la population sont sous représentées dans les représentants du peuple. Il s’agit des catégories populaires (ouvriers et employés), des membres des « minorités visibles », mais c’est aussi le cas les jeunes adultes et des femmes
B. Les explications de la sous-représentation de certaines catégories
Comment expliquer cette plus ou moins grande sous représentation ?
Il faut partir de ce que l’on vu sur les processus de désignation des candidats, et en particulier insister sur les parcours permettant de devenir candidat, puis élu. Ce parcours est une succession d’étapes dans la vie d’engagement : sympathisant, adhérent, militant, candidat, élu
Le passage de l’un à l’autre expose à une série de coûts :
- paiement d’une cotisation quand on passe de sympathisant à adhérent, et un peu de temps passé (souvent 1 réunion par mois) ;
- passer du temps en réunion le soir quand on passe de adhérent à militant : plusieurs réunions par mois, le soir en général ;
- passer aussi du temps en réunion en journée quand on devient élu, puisqu’on travaille avec des professionnels (fonctionnaires, prestataires, permanents d’association …).
Il faut donc être prêt à assumer le coût en argent et en temps, pris sur sa vie familiale et personnelle.
De plus, pour se faire remarquer et apprécier par ses camarades, il ne suffit pas de bien présenter et d’être proche des gens ; il faut aussi des compétences comme :
- être capable de comprendre des textes ou documents chiffrés parfois arides ;
- être capable de prendre la parole en public, et clairement ;
- être capable d’argumenter, c’est-à-dire de réfuter des arguments, de proposer des contre arguments ;
- être capable de s’exprimer aussi par écrit ;
- être capable de gérer la tension créée par les jalousies, concurrences et rivalités.
Quand on agrège ces contraintes, on peut comprendre pourquoi certaines catégories sont peu présentes parmi les élus :
-
peu de disponibilité le soir pour des réunions : pères et mères de famille, actifs devant se lever tôt le lendemain pour une journée de travail physique …
-
faible dotation en capital culturel (niveau de diplôme), ne donnant pas les outils pour participer au débat politique de façon abstraite, et ne permettant pas de prendre le recul nécessaire (milieux populaires, minorités visibles) ;
-
faible légitimité sociale à se mêler au débat public, du fait de difficultés à s’insérer dans la société civile (membres de minorités, jeunes …) ;
-
l’apprentissage politique demande en engagement dans le temps, qui se traduit par l’accès à des fonctions électives au bout de plusieurs années de militantisme, alors que la société contemporaine est marquée par l’immédiateté (jeunes).
La troisième cause renvoie aux discriminations dont sont frappés les jeunes, les minorités visibles ou les femmes dans leur accès à l’emploi, particulièrement à l’emploi qualifié et de prestige (plafond de verre). Le mécanisme est le même pour l’accès aux fonctions politiques, avec le même plafond de verre.
C. La parité: une mesure volontariste pour une représentation des femmes
“La loi n° 2000-493 est promulguée le 6 juin 2000. Elle prévoit la parité alternée pour les élections à un tour comme les Européennes ou les Sénatoriales à la proportionnelle, la parité par tranche de six pour les élections à deux tours comme les Municipales (dans les communes de 3 500 habitants et plus) et les Régionales (concernant ce dernier scrutin, une modification* interviendra après le retour de la droite au pouvoir et les Régionales de 2004 respecteront elles aussi la parité alternée). Il s’agit de contraintes effectives dans la mesure où des listes qui ne sont pas paritaires ne sont, tout simplement, par enregistrées. En revanche, pour les élections législatives, le système n’est qu’incitatif. Les partis qui ne présentent pas 50% de candidates obtiennent un moindre financement public. Ils sont donc parfaitement libres de préférer désigner des hommes et de recevoir moins d’argent. Les élections non concernées par la loi sont les Cantonales et les Municipales dans les communes de moins de 3 500 habitants.”
Janine Mossuz-Lavau, Histoire et enjeux de la loi sur la parité, www.ceras-projet.org
Remarque: La loi du 31 janvier 2007 oblige également à la parité dans les exécutifs locaux (adjoints au Maire ou vice-président de région et de département), en instaurant une élection avec un scrutin majoritaire de liste.
1) De quelles natures sont les contraintes agissant en faveur de la parité ?
Ces contraintes œuvrant pour la parité sont de deux natures :
– législatives contraignantes comme par la loi de 2000 qui vise « un égal accès des hommes et des femmes aux fonctions politiques », obligeant à la parité pour les élections de liste (municipales, régionales, européennes, sénatoriales quand plus de 3 postes) et complétée par la loi de 2007, obligeant à la parité dans les exécutifs locaux : bureaux municipaux, vice présidence de département ou de région. De plus depuis 2007, les candidats titulaires et remplaçants des élections cantonales doivent être de sexe opposé ;
– législatives incitatives, comme pour les élections législatives, où au niveau national, les partis sont invités à atteindre une parité relative (48%) dans les candidatures, sous peine de sanctions financières (retenues par l’État sur les subventions versés aux partis en fonction du nombre de voix obtenues aux élections législatives).
2) En quoi sont-elles efficaces ?
Les premières sont contraignantes car elles constituent une obligation : elles sont donc efficaces :
-
Ainsi, la part des femmes dans les conseils municipaux des communes de plus de 3 500 h, soumis à la loi sur la parité, est passée de 25 à 27 % en fonction de la taille en 1995, à 47-48% à partir de 2001 ;
-
Pour les conseils régionaux, la proportion est passée de 27,1% en 1998 à 48% en 2010 ;
-
De plus, on remarque que la part des femmes dans les conseils des communes de moins de 3 500 h, non soumis à la parité obligatoire, a aussi augmenté de 21% à 32,2% en 2008 : la parité imposée provoque par imitation, une tendance paritaire « spontanée » dans les petites communes.
Pour les cantonales, depuis l’application de 2007, la proportion de femmes parmi les Conseillers Généraux est passée de 10,9% à 13,1% (2008) puis 13,8% (2011). Il semble que la parité soit difficile à obtenir pour les élus(e)s pour les élections uninominales (même avec un binôme). Pourquoi ?
-
les femmes sont souvent suppléantes ou remplaçantes (cantonales) ;
-
les femmes sont souvent envoyées dans des circonscriptions difficiles
-
elles sont parfois confrontées à des candidatures dissidentes masculines (sortants ne voulant pas lâcher, élus implantés contestant des choix féminins par le parti)
Transition: cette sous-représentation de certaines catégories ainsi que des taux d’abstention élevés pour certaines élections peuvent être le signe d’une démocratie représentative en crise.
V. Vers de nouvelles formes de démocratie?
A. La démocratie participative et délibérative
Pour avoir des exemples concrets dans différents pays européens, je vous conseille de regarder le document vidéo réalisé par Arte et que j’ai mis en ligne
La démocratie participative? C’est une forme particulière de procédure démocratique qui repose sur une participation plus directe des citoyens à la décision
En quoi consiste la démocratie délibérative ?
Forme particulière de procédure démocratique qui repose sur la confrontation publique les avis des citoyens, des élus et des experts,avant la prise de décision
Par exemple les consultations nationales autour des trajets du TGV.
Quelles sont les différences entre les deux nouvelles formes de démocratie ?
L’objectif premier de la démocratie délibérative est d’améliorer la décision politique, alors que la démocratie participative vise avant tout à rendre le citoyen actif.
La démocratie délibérative est un approfondissement de la démocratie participative avec un niveau d’exigence doublement accru:
-
Elle oblige les élus et les experts à creuser leur réflexion et à proposer plusieurs scénarios possibles pour qu’un débat et un choix puisse avoir lieu ;
- Elle oblige les participants à sortir de la défense de leurs intérêts personnels, et à argumenter dans le sens de l’intérêt général.
Complément:
La démocratie participative trouve sa source dans l’idéologie contestant l’autorité et l’ordre établi dans les années 1960. Elle est liée aux interrogations de la période sur la “tyrannie de la majorité” pour reprendre la formulation de Alexis de Tocqueville. C’est aussi la marque du rejet de la professionnalisation de l’activité politique, et de la remise en cause de la parole des « experts », accusés, comme les représentants élus, de faire le jeu du système capitaliste et des forces conservatrices.
B Les démocraties délibératives et participatives renforcent-elles ou se confrontent-elles à la démocratie représentative?
Il y a un consensus assez large, sur la volonté d’un système politique qui soit le plus démocratique possible. A ce stade peut-on alors penser que l’essoufflement constaté du système représentatif dans la plupart des démocraties, peut être redynamisé par une démocratie plus participative?
Les avantages indéniables d’un renforcement de la démocratie participative:
– Elles contraignent les élus à prendre des décisions en ayant au moins pris un avis, une tendance, auprès des citoyens, premiers concernés par leurs effets, et pas seulement sur la base d’un programme politique tranché lors des élections ;
– Elles obligent les élus à mieux approfondir leur analyse préalable pour que leur projet résiste aux critiques, donc amènent logiquement à des projets plus rationnels, avec une meilleure allocation des deniers publics ;
– Elles permettent à des citoyens divers de prendre part au débat public, et peuvent susciter des vocations permettant un renouvellement du personnel politique, en incitant les participants à s’engager en politique.
Pour autant il y a des limites au renforcement de la démocratie participative:
Le processus de co-construction des politiques qui devrait se mettre en œuvre lors d’une concertation peut faire l’objet de plusieurs écueils :
– les élus et leurs services se contentent d’informer, de façon descendante sur des orientations qu’ils ont déjà décidées, d’où une impression de manipulation ressentie par les citoyens qui participent ;
– les citoyens participants sont ceux qui ont quelque chose à défendre, à réclamer, ou qui veulent protester : opposants politiques, personnes impactées par un projet de la collectivité, militants associatifs qui viennent défendre leur « crémerie », frustrés du suffrage universel (candidats non élus ou refoulés) qui recherchent une légitimité politique de substitution …
– le « temps politique » diffère du « temps citoyen ». En effet la prise de décision suppose le respect d’un processus s’inscrivant dans le temps, qui peut s’écouler sur plusieurs budgets et plusieurs années, avant que la réalisation soit concrète et opérationnelle. Il peut alors en découler un sentiment de frustration des citoyens, qui ont l’impression que « les choses n’avancent pas », d’où un découragement et une perte de crédibilité de ces instances participatives ;
– les avis formulés par les participants peuvent diverger de ceux des élus. Or, la loi donne la légitimité et la responsabilité politique des choix aux élus (qui après tout ont été élus pour çà !). En cas de non prise en compte des avis citoyens, surtout s’ils sont majoritairement partagés dans le groupe, il peut s’établir un hiatus, une incompréhension, voire un sentiment de mépris chez des citoyens qui n’auront pas été écoutés mais seulement entendus
La démocratie représentative peut aussi être déstabilisée par ces nouvelles formes de démocraties car :
– Des élus ayant insuffisamment préparé leurs dossiers peuvent être mis en difficultés lors du débat public. Or la plupart des élus ne sont pas des professionnels de la politique mais des citoyens qui se sont engagés, avec leurs compétences et leurs limites. Ils risquent donc d’être déconsidérés aux yeux de la population, ce qui remet leur légitimité personnelle en cause
– Les citoyens participants sont politiquement irresponsables des avis qu’ils donnent. En effet, la responsabilité des choix incombe aux élus ; donc si des avis pris en compte se révèlent amener à de mauvaises décisions, ce sont les élus qui en portent la responsabilité, non les citoyens les ayant suggérés. Ceux qui donnent leur avis voudraient décider, sans avoir à porter le poids de la responsabilité du choix !
– Se pose aussi un problème de légitimité des élus : pourquoi élire des représentants s’ils passent leur temps à organiser des débats avant la prise de décision. De nombreux citoyens peuvent se dire qu’ils ont élus des représentants pour gérer les affaires publiques, et qu’ils n’ont qu’à faire ce pourquoi ils ont été élus ;
En conclusion du thème
Les nouvelles formes de démocratie permettent de remédier à certaines limites de la démocratie représentative. Tout d’abord, des citoyens peu actifs peuvent être mobilisés et d’autre part cela contraint les élus à mieux formuler leurs projet pour les confronter aux attentes des citoyens.
Pour autant, ces nouvelles formes démocratiques ne sont pas exempts de critiques. Ainsi, se pose le problème de la prise en compte des avis des citoyens par les représentants. Les citoyens doivent avoir conscience de véritablement participer à l’action politique mais dans le même temps ils ne sont pas responsables politiquement des prises de décision qui impacteront uniquement les élus. De plus, se pose le problème de de la représentativité de ces citoyens. Les réunions ne déplacent qu’une minorité de citoyens souvent déjà sensibilisés aux affaires publiques.
Aussi nous pouvons conclure que ces nouvelles formes de démocratie apportent autant d’enrichissements à la démocratie représentative qu’elles ne viennent la remettre en question. Compte tenu de l’évolution du niveau de formation de la population, il est normal que les citoyens, plus instruits, souhaitent voir leur avis davantage pris en compte ; il est donc illusoire de refuser ces nouvelles formes de démocratie, mais il convient de s’interroger sur leur articulation optimale avec la démocratie représentative, qui demeure le socle de notre vie politique.
Mise à jour : janvier 2019